C’est dans le Blue Star 1 que nous voyageons. Dans un peu plus de 5 heures si tout va bien, nous serons au port du Pyrée.
Beaucoup de Grecs à bord, puis des touristes, anglais et français pour la plupart, mais aussi un peu d’allemands, une pincée d’européens du nord, Danemark, Norvège, Finlande, Suède. Peu d’entre eux ont leur propre véhicule, le tourisme sur les îles des Cyclades est adapté aux personnes venant en avion ou bateau, en piéton avec une simple valise ou un sac à dos. Tout y est prévu pour elleux qui peuvent louer à peu près tout pour leur séjour.
A bord, passée la cohue de la montée à bord et de l’installation, il y a toujours un certain étirement du temps, qui est à la fois excitant et ennuyeux, ou plutôt, délicieusement ennuyeux.
C’est un temps à vivre : aller sur le pont, y surprendre un point de vue, une lumière particulière, une photo peut-être, lire – toujours le premier volume du Temps retrouvé que je distille et étire – manger (bien choisir la qualité et la quantité) assez pour ne pas risquer d’être malade, pas trop pour ne pas s’endormir, regarder, écouter les autres parler (deviner la langue entendue, interpréter les liens inter personnels en fonction du style et du ton employé), aller aux toilettes chaque fois que nécessaire et constater la dégradation progressive et inéluctable des lieux à tous les niveaux (je n’insiste pas), remarquer les 3 ou 4 personnes que l’on revoit régulièrement et semblent toujours chercher leur place, les toilettes, leur pet, le pont 7, leur ami(e), que sais-je encore, et qu’ils ne trouvent jamais. C’est une très bonne façon de tenir à distance son angoisse du voyage en bateau c’est vrai, mais c’est coûteux en énergie et surtout vous ne contrôlez plus rien.
Non, ce qu’il faut c’est alterner, en cycles, un peu de tout.
A ce tout on pourra ajouter, sans faire d’impasse ni discrimination, faire un scrabble, boire un café, faire un tour en business class (surtout fringué en bobo débraillé), regarder par un hublot, voir la mer de l’avant du bateau si jamais des dauphins venaient danser autour de la proue dans une joyeuse fête (jamais vu, mais on le raconte), voir l’arrière du bateau et se réjouir de toute cette limonade que semble fabriquer les hélices en brassant l’eau avec force, se lamenter qu’elle soit perdue, se consoler en pensant aux chicots sauvés, regarder les gens – couché sur le dos -‘sur les lames du plafond en métal brillant et formant d’eux une image déformée : très drôle mais l’effet peut devenir hypnotique et on risque alors le sommeil (fréquent) ou un déphasage sensoriel (bénin), regarder les autres îles des Cyclades au loin (il y en a tellement), d’un regard pénétrant (ça vous plante une stature mais personne ne vous prend en photo,va pas de raison).
On peut aussi céder à Nathalie qui veut jouer au Yams sachant que les chances de la gagner sont minces mais pas nulles.
Dormir un peu, toute la question est de veiller à ce que ce peu reste bien peu et ne s’emballe pas en ronflade incontrôlée. Et en général, on arrive au port dans les 15 minutes restantes.
Vers 15h30 on sort du bateau, moutons lâchés dans la ville en pleine activité de prédation, camions hurlants, motos zigzaguant sur la bande d’arrêt d’urgence, filant par 35 degrés déjà fin juin, direction le camping Glaros à Kineta pour une nuit, vraiment pas terrible (en plus du reste on déconseille formellement le gyros, on se rabattra avantageusement sur une pizza) mais seule halte possible avant le suivant, juste avant Patras où nous resterons jusqu’au 4 juillet, pour y prendre notre bateau pour Venise.
Et la moto ? Jamais si bien marché, son nouveau régime lui convient très bien ! 😎