Entre Alghero et Argentiera

Alghero, la plus Catalane des villes Sardes, nous fait signe au loin de sa grande roue colorée aux LED, on la voit depuis notre installation dans la baie de Fertilia où se niche notre camping.

Ce soir on y retrouvera Isabelle et Angelo, mais en attendant ce rendez-vous, on s’y rend pour une visite du vieux centre cet après-midi.

En entrant en ville, on cherche d’abord une station service qui aurait du Super 98 ou plus, car pour celles et ceux qui n’ont pas suivi nos pérégrinations précédentes, la Guzzi ne fonctionne bien qu’avec ce breuvage. On le trouvait encore l’an dernier en Italie, y compris avec un taux d’octane jusqu’à 100. Mais il semblerait qu’en Sardaigne en tous cas, on ne trouve plus que le seul Super 95. On se résout à en prendre tout de même car d’une part il contient seulement 5% d’éthanol ( en France il est à 10%, et ça ne convient pas du tout à notre moteur ) et d’autre part j’ai prévu une petite fiole de modificateur de taux d’octane au cas où… On fait donc notre petit mélange et pour l’instant et jusqu’ ici, ça fonctionne bien.

Ça pourra vous paraître étrange mais ce qui ne paraît être qu’une petite tracasserie altère rapidement notre moral : on craint de se retrouver pris dans des problèmes d’injection déjà rencontrés en Italie, en Grèce et en Turquie, toujours survenus après un plein d’une essence de mauvaise qualité.

Bref, ça fonctionne pour cette fois et on n’y pense plus. On se gare devant le port de plaisance, là où il y a déjà des dizaines de 2 roues, puis on entre à pied par une porte taillée dans l’épaisse muraille d’enceinte de la vieille ville.

On découvre une vieille ville vivante, et pas encore trop envahie de touristes que nous sommes. La saison démarre et il y a déjà pas mal de monde.

Il reste sur le chemin de ronde de la muraille, plusieurs armes défensives utilisées par les Catalans lorsqu’ils occupaient les lieux, tel ce lanceur géant de boules de granit, plus loin ce sont deux canons énormes sur leurs supports à roues de bois… Autant d’accessoires qui font moins dans la diplomatie que dans la dissuasion, ce qui n’a guère changé.

On file à notre rendez-vous et retrouvons Isabelle et Angelo. C’est l’heure de l’apéro et on est juste à côté d’une adresse éprouvée et recommandée par eux, à l’intraduisible « Prociutteria » ou « Jambonnerie ». // Attention : séquence Guide du Routard // Le patron est aux petits soins, il prodigue un accueil chaleureux et sert de bons produits à prix contenus. Après un Campari Spritz parfait, on a faim et on file aux « 100 Pizze », tout est dans le nom, qui tient tous les paris ! // Fin de la séquence Guide du Routard //.

A l’heure de se quitter il fait nuit et mon téléphone qui supporte mal les vibrations de la Guzzi ne peut pas faire la photo (voyez plus haut comme c’est flou…), c’est donc une autre photo qui fera office de, un selfie x 4 pris par Angelo dans la file d’attente du ferry à Toulon.

Une fois n’est pas coutume, je poursuis ici avec la ballade du lendemain.

Encore une bonne nuit au camping, notre emplacement situé face à la lagune nous gratifie par vent d’ouest, d’effluves vaseuses matinées de poissonnade, juste de quoi nous rappeler que l’endroit est bien vivant.

On déjeune rapidement thé noir pain miel et filons nord ouest en direction d’Argentiera, village autrefois connu pour ses mines d’argent, exploitées déjà par les Romains et les Phéniciens, c’est dire. L’exploitation y est arrêtée puis rouverte au XIX^e siècle. Le site connaît une période florissante vers 1940 puis décline après la Seconde Guerre mondiale. La mine est fermée en 1963. Elle fait aujourd’hui partie d’un programme de rénovation et de sauvegarde, on peut y voir les vestiges de la laverie (en travaux en ce moment) avec ses charpentes de bois et les fours destinés à la fonte des minerais formant un des plus intéressants exemples d’archéologie industrielle en Sardaigne.

L’ambiance y est saisissante, on s’attend à voir sortir quelqu’un a tout moment, pas depuis l’histoire mais de ce qui ressemble à des studios de tournage cinématographique.

À deux pas de là, une cour aménagée ou plutôt destinée au sol, aux jeux de ballons, et tout de suite la mer, qui lèche  à l’os, d’anciennes bites d’amarrage.

Dans ces eaux transparentes, on a vu de par le fond, des anneaux métalliques d’une soixantaine de centimètres de diamètre, livrés aux attaques du sel. Restes épars d’une rustique horloge des Dieux de l’Olympe, ou alliances d’amours déçues de quelques géant.e.s de passage ici ?